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Lenno : les vulnérabilités font la force dans le monde de l’événementiel

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21 juin 2021

Damien Beigbeder se confie sur Lenno et la tenue de ses événements

Damien Beigbeder est un acteur majeur de la pop culture bordelaise, et désormais française, depuis près de vingt ans. Membre fondateur de l’association Mandora, qui a lancé dès 2005 le festival Animasia, il créa en 2015 dans cette continuité Lenno. Les festivals se sont alors multipliés, avec l’émergence du Bordeaux Geekfest, de l’Indie Game Factory, ou encore de l’Angers Geekfest.

Après deux années durant lesquelles le monde de l’événementiel a été durement frappé par la crise sanitaire du COVID-19, le temps de la culture semble à nouveau se conjuguer au présent. Damien Beigbeder revient avec nous sur les forces de Lenno, les projets qui ont émergé durant ces derniers mois, et la vision à long terme de son implication évènementielle et pop-culturelle.

Lenno Logo

Bonjour Damien. Tu es notamment le fondateur et président des festivals Animasia et Geekfest. Quel est ton sentiment vis-à-vis de la reprise des festivals ?

Un sentiment de joie de prime abord.

La joie de retrouver des amis de longue date, qui participent de près ou de loin à nos événements depuis bientôt 20 ans.

De retrouver une famille, éclectique, enthousiaste, forte, composée des bénévoles, des salariés, des associations, des entreprises, des partenaires et bien entendu du public, car certains nous suivent depuis le début, merci à eux !

Lenno - McCoy

Puis une volonté, celle d’aller encore plus loin dans nos propositions, de continuer à créer du lien, de proposer des festivals différents afin de (ré)inventer le présent et d’imaginer le futur de nos sociétés, l’orienter, lui conférer un sens pour toutes et tous.

La pop culture et toutes les communautés afférentes ont un rôle déterminant à jouer dans les prochaines années.

Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités.

Allons-y gaiement !

L’adaptation est le maître-mot des événements Lenno. Comment s’adapter face à des contraintes extérieures et évolutives, comme celles liées à la crise sanitaire ?

Je crois beaucoup aux vulnérabilités qui renforcent.

Aux contraintes qui deviennent des opportunités.

Nous nous sommes construits sur cette base depuis le début des années 2000.

Pas d’argent, pas de réseaux professionnels, globalement pas de moyens. Il a donc fallu se retrousser les manches, faire montre de créativité, d’innovation dans l’être et le faire, créer des partenariats, prendre des risques, monter ex nihilo des équipes organisatrices bénévoles et professionnelles … La pandémie nous a rappelé nos interdépendances ainsi que le sens premier de notre action : donner et se faire plaisir, toutes et tous ensemble, malgré les difficultés. Le plaisir de réfléchir au sens, d’anticiper, d’organiser, de se retrouver puis de vivre, ensemble, des pans de vie intenses à souhait !

Chaque structure et organisation s’est adaptée à sa façon.

De notre côté, en sus d’améliorer nos process internes et externes et de repenser nos sites, nous en avons profité pour innover, avec en juin 2020, l’organisation du premier événement européen B2C 100% virtuel, le BGF Virtual Experience puis la 8e édition de l’Indie Game Factory également en virtuel, qui a permis à des centaines de professionnels, journalistes et étudiants français et étrangers, de découvrir les industries créatives africaines.

BGF Virtuel

Enfin, nous avons relancé des projets sur lesquels nous n’avions malheureusement pas le temps de nous consacrer sur des années de production dites « normales ».

Nous avons financé via une campagne participative le premier tome d’une longue série de notre encyclopédie geek, M42, qui nous permet ainsi d’élargir notre offre éditoriale et de donner plus d’ampleur à nos thématiques annuelles qui viennent nourrir nos festivals tout au long de l’année (voir plus bas).

Il y a également le lancement, certes discret mais réel, de notre label et marque NPA : né(e)s pour agir.

Il s’agit de « disrupter » le textile neuf en proposant à tous les festivals et professionnels de l’événementiel des textiles issus de la filière seconde main en Gironde.

Nous redonnons vie à des vêtements voués à être jetés, nous valorisons une filière, ses emplois et afin de boucler la boucle, les broderies et autres impressions sont également faites dans la région.

Le label devrait avoir son propre événement d’ici quelques mois, un événement éminemment responsable et qui engagera nombre de partenaires à adopter des pratiques vertueuses en lien avec les enjeux écologiques colossaux du moment.

La saison événementielle 2021 aura été bousculée. Que nous réserve le deuxième semestre du côté de Lenno ?

Nous sommes de retour. De retour après 22 mois sans événement pop culture à Bordeaux et en Gironde avec le Festival Animasia, qui fait la part belle aux cultures asiatiques traditionnelles et pop, et qui revient sur les deux formats habituels avec :

  • une édition, gratuite, d’Animasia Le Haillan, le samedi 10 juillet 2021 au cœur de la ville du Haillan ;
  • une édition d’Animasia au parc des expositions de Bordeaux sur le thème de la gastronomie, les 9 et 10 octobre 2021.

Entretemps, nous aurons le plaisir de fêter la 2e édition d’Angers Geekfest les 11 et 12 septembre 2021, qui a été l’un des rares (2 de mémoire) événements pop culture en France en 2020.

Enfin, pour la partie professionnelle, nous retrouverons la 9e édition de l’Indie Game Factory le 24 septembre 2021, ainsi que notre nouvel événement : l’African Creative Meeting, les 23 et 24 septembre. Ce dernier prend place dans la saison Afrique/France organisée par l’Institut Français, et se déroulera en format virtuel afin de faire la part belle aux industries créatives dans leur acception globale avec une mise en lumière des pépites des 54 pays qui forment le continent africain.

African Creative Meeting

Les calendriers 2022 et 2023 ont d’ores et déjà été validés. Que peut-on attendre des saisons à venir ?

Une organisation qui évolue, une programmation qui gagne en qualité et profondeur, il me semble que c’est tout le mal que l’on peut se souhaiter sur les saisons 2022 et 2023 !

L’idée était également de rendre public beaucoup plus en amont notre travail réflectif autour de nos festivals et thématiques afin de permettre à tout un chacun de proposer des idées, de suggérer des invités, de participer à la vie des festivals en somme !

Enfin, cela permet de réaffirmer notre optimisme et notre volonté farouche malgré cette période et les difficultés inhérentes.

Nous sommes encore là pour longtemps et nous avons encore plein d’énergie et d’envie pour les décennies à venir !

La thématique des Geekfest 2022 sera donc « Le geek au féminin ». Un sujet des plus vastes. Sur quoi voudriez-vous insister au cours des différents événements ?

Le sujet est vaste, assurément !

Damien Beigbeder et RamseyL’idée principale est de donner et/ou de redonner la place que méritent nombre de femmes oubliées dans l’histoire, dans les domaines scientifiques et culturels notamment, il y a tant de destins grandioses à découvrir et à faire découvrir !

Nous resterons sur les bases de notre ligne éditoriale qui, autant que faire se peut, propose de la nuance dans le traitement de nos thématiques car l’on sait malheureusement que l’on peut vite tomber dans le manichéisme et l’invective.

Notre société moderne est, via les réseaux sociaux, sous le diktat de l’émotion et de l’immédiateté, sans recul ni réflexion aucune.

Nous essaierons de proposer des conférences et débats denses, profonds, optimistes et nuancés.

Tout un programme, à nous le soin !

« A la conquête de l’espace », la thématique 2023, c’est une promesse que vous lancez à votre public ? Celle d’aller toujours plus loin, de voir toujours plus grand ?

Pas forcément.

C’est encore une fois l’occasion de poser un débat. D’ouvrir une discussion.

Nous avons toutes et tous été émerveillés par la nouvelle escapade (toujours en cours) de Thomas Pesquet à bord de l’ISS avec, en ligne de mire, un voyage sur Mars.

Mais cette conquête spatiale pose aussi des questions sur les orientations que peuvent prendre nos sociétés, des choix cornéliens des gouvernants sur les prochains lustres.

Se recentrer sur le pourquoi me semble salvateur et permettra des débats nourris et constructifs sur les objectifs et intérêts de tous les programmes spatiaux en cours et à venir.

Quoiqu’il en soit, cela nous permettra d’ouvrir grand les yeux et les oreilles pour découvrir et comprendre notre univers, les planètes, les missions passées et de laisser notre imaginaire vagabonder !

Passionnant !

Pour le festival Animasia Le Haillan 2022, vous allez (déjà) fêter la 10e édition tandis qu’Animasia fêtera, lui, sa 20e édition en 2024. Qu’est-ce qui a changé dans la pop culture en deux décennies ?

Les rites de passage que sont les anniversaires sont primordiaux.

Cela permet de se retourner, de prendre le temps de célébrer, un compagnonnage, celui entre Mandora, Lenno et la mairie du Haillan pour la version gratuite et anciennement printanière d’Animasia.

De jeter un regard bienveillant et admiratif sur le chemin parcouru en 10 ans.

Quant à la pop culture, qu’est-ce qui a changé en 20 ans ?

A la fois tout et rien.

Tout, car au début des années 2000, la pop culture était encore une sous culture. Je me rappelle des rayons faméliques de mangas dans les enseignes culturelles et de grande distribution.

Le regard amusé, parfois moqueur mais surtout de l’incompréhension du grand public vis-à-vis des cultures de l’imaginaire et des communautés geek.

Puis Internet a continué son essor, les smartphones, les industries cinématographiques et culturelles avaient besoin de nouveaux héros, de nouvelles histoires.

C’est un véritable raz-de-marée depuis lors.

Les chiffres des différents secteurs parlent d’eux-mêmes.

Et rien, car la passion qui animait les geeks, la curiosité qui faisait pétiller les regards, cette bienveillance, cet amour sont toujours là, présents, sauf que désormais, nous sommes chaque jour plus nombreux !

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C’était une de mes frayeurs sur nos événements. Que la popularité de ces cultures ne fasse muter le public avec les déviances que l’on peut voir parfois.

Ça n’est pas le cas et cela fait chaud au cœur !

Le public initial a grandi, transmis des valeurs aux nouvelles générations qui viennent par milliers se rencontrer lors de nos événements.

La pop culture est devenue désormais une norme culturelle et mondiale.

Quel chemin parcouru en à peine 20 ans !

Depuis bientôt 20 ans, les festivals se sont à la fois multipliés et agrandis, les projets se sont diversifiés : l’avenir, de quoi se constitue-t-il ?

J’ai une croyance forte.

Celle que la pop culture, cela fait écho à la première question, peut et va emmener les publics vers la culture plus traditionnelle.

C’est en ce sens que nous travaillons au quotidien.

Raconter des histoires, ériger de nouveaux héros, des exemples à suivre, créer du lien, de la bienveillance, construire des ponts, attiser la curiosité, remettre l’exigence, l’effort et l’apprentissage au goût du jour, questionner le monde qui nous entoure, avoir une tête bien faite plutôt que bien pleine en somme … il y a de quoi faire !

A notre humble niveau, cela passera par de nouveaux projets mais également par de nouveaux territoires à découvrir, à initier, à arpenter et à animer.

Les municipalités, métropoles, départements et régions ont bien compris l’intérêt de nos événements pluriels.

Une demi-douzaine de villes se sont positionnées pour accueillir un Geekfest fin 2022, nous sommes sur le principe du temps long, les négociations sont en cours mais gageons qu’en fin d’année, un nouveau Geekfest verra le jour en France !

Public BGF

Pour revenir sur une vision plus globale, nous souhaitons lutter contre une certaine uniformisation de la culture/pop culture et plus largement des codes culturels.

Avec l’avènement des nouveaux médias, on trouve les mêmes contenus, au même moment sur la terre entière !

Se pose la question de l’unicité de chaque culture, de l’enrichissement personnel et collectif par et avec l’autre, d’où la nécessité de mettre en avant et de parler de la diversité culturelle qui est le fondement de notre patrimoine culturel mondiale.

Il y a tant à découvrir, la culture restant le meilleur chemin d’une personne à l’autre.

Merci Damien. Que ce second semestre événementiel vous soit favorable !

Merci ! Hâte de toutes et tous vous retrouver !

Live long and prosper!

Damien Beigbeder et Murray

 

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